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Vatican News | Au Cambodge, des élections sans opposition

Entretien réalisé par Delphine Allaire – Cité du Vatican

 

C’est une campagne électorale dominée par la peur qui s’achève au Cambodge. Le Premier ministre Hun Sen, en poste depuis 33 ans, remet en jeu son mandat dimanche 28 juillet pour un scrutin législatif, sans surprise car sans opposition.

Les partisans du Premier ministre Hun Sen qui se représente dimanche 29 juillet aux élections législatives après 33 ans de pouvoir.  (AFP or licensors)
Les partisans du Premier ministre Hun Sen qui se représente dimanche 29 juillet aux élections législatives après 33 ans de pouvoir. (AFP or licensors)

Cela fait trois décennies que le Premier ministre Hun Sen contrôle le Cambodge. Et l’ex-combattant khmer rouge, aux manettes du Parti du Peuple Cambodgien (CPP), espère bien se maintenir au pouvoir à la faveur des législatives de ce dimanche 29 juillet. L’issue du scrutin laisse en effet peu de doute.

 

En 2017, le seul parti d’opposition crédible, le Parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP) a été dissous, son chef, Kem Sokha, emprisonné. Pour le fondateur du parti, Sam Rainsy, exilé à Paris, ces législatives sont une vaste «farce». Ainsi, le seul moyen pour l’opposition de faire entendre sa voix est de réclamer le boycott du scrutin. «Un jeu à double tranchant pour les citoyens», estime Mathieu Guérin, spécialiste du Cambodge à l’Inalco, qui précise que si le bulletin de vote «est bien secret», «l’abstention, elle, est publique, avec les risques que cela comprend». 

Jouer sur les traumatismes de la dictature

Ainsi vendredi 27 juillet, lors d’un dernier meeting électoral, Hun Sen a salué les efforts du pouvoir pour «éliminer les traîtres». «Récemment, nous avons pris des mesures légales pour éliminer ceux qui tentaient de renverser le gouvernement et de plonger de nouveau le pays dans la guerre», a déclaré le Premier ministre, devant des dizaines de milliers de partisans réunis à Phnom Penh, la capitale. Depuis des mois, le Premier ministre dénonce toute velléité de «révolution de couleur», jouant des peurs des citoyens encore traumatisés par le régime khmer rouge, coupable d’un génocide ayant fait près de deux millions de morts dans les années 1970.

 

Le chef de la police de Phnom Penh a averti, la police est prête à «empêcher tout acte de terrorisme et de chaos politique». Ce dimanche les forces de l’ordre quadrilleront la ville, plus de 80 000 policiers sont mobilisés.

 

«Mains sales et doigts propres»

Sur les réseaux sociaux, les opposants ont lancé la campagne dite du «doigt propre». Au Cambodge, les électeurs trempent leur doigt dans une encre indélébile après avoir déposé le bulletin dans l’urne, comme le veut la procédure électorale. «Cinq affaires liées à la campagne dite du “doigt propre” ont été ouvertes», a déclaré lundi Hang Puthea, porte-parole de la commission électorale. Les cinq contrevenants risquent plus de 4.200 euros d'amende chacun.

 

En l’absence d’opposition, le CPP est assuré de remporter le scrutin, mais au prix de sa crédibilité internationale. L’Union Européenne et les Etats-Unis ont en effet suspendus leur assistance à l’organisation de ce scrutin.

 

Mathieu Guérin, enseignant-chercheur à l’Inalco spécialiste de l’Asie du Sud-Est, dont le Cambodge, nous analyse les ressorts politiques et historiques de cette ère Hun Sen.